mercredi 27 novembre 2013

Flaubert, les sciences de la nature et de la vie

Flaubert, les sciences de la nature et de la vie

Appel à communications
Numéro spécial de la revue Gustave Flaubert ITEM/CNRS
Envoi des propositions : 15 janvier 2014
Remise des textes : avril 2014

Dès 1837, Une leçon d’histoire naturelle. Genre commis manifeste l’intérêt de Flaubert pour les sciences de la nature, et il cite Pline et Cuvier. Sans doute est-il déjà sensible à la mode des Physiologies qui se multiplient dans les années 1830, d’autant plus que Balzac avait lui-même pratiqué ce genre. Toutefois, dans la réflexion et l’œuvre de Flaubert la grande période des sciences de la nature débute plus tard. Dans les derniers chapitres de L’Éducation sentimentale  de 1845 se forme un idéal d’impersonnalité et d’indépendance par rapport aux préjugés dont les sciences naturelles semblent alors fournir le modèle : « La science ne reconnaît pas de monstre, elle ne maudit aucune créature, et elle étudie avec autant d’amour les vertèbres du serpent boa et les miasmes des volcans que le larynx des rossignols et que la corolle des roses. » Dans les réflexions esthétiques de la Correspondance des années 1850, Flaubert cite Cuvier, Geoffroy Saint-Hilaire, Buffon tandis qu’il rédige Madame Bovary en relisant du Balzac, et en réfléchissant sur ce que doit être désormais le roman moderne et la prose. Ce sont aussi des années d’intenses discussions et de collaboration croisée avec Louis Bouilhet qui écrit son grand poème « Les Fossiles » (1854). Non seulement Flaubert a fait tout au long de sa vie de nombreuses lectures dans le domaine des sciences de la nature (plus nombreuses encore dans la période de Bouvard et Pécuchet) – lectures dont on trouve les traces dans la Correspondance, dans les Carnets de travail, les dossiers documentaires, et les manuscrits des œuvres –, mais il rencontre aussi de nombreux scientifiques. Sa famille est liée à la famille Pouchet, dont le père est le fondateur du Muséum d’histoire naturelle de Rouen et l’adversaire de Pasteur, et le fils, naturaliste également, l’informateur de Flaubert (et de Zola) sur les questions qui touchent aux sciences de la nature et de la vie. À partir de 1862, il fréquente aux dîners Magny Berthelot (intéressé par la biochimie), Claude Bernard, Renan.   
Les sciences naturelles sont impliquées dans l’évolution esthétique de Flaubert, dans sa formation intellectuelle, et dans la rédaction des œuvres soit parce qu’elles fournissent des représentations, des interrogations, ou une perspective épistémologique qui oriente la structuration de la fiction. Garantes jusqu’à un certain point d’une nouvelle méthode de travail et d’observation, de la réinvention d’une forme romanesque après Balzac (dont l’œuvre trop idéologique agace parfois Flaubert), et contre un certain romantisme, les sciences de la nature et de la vie donnent aussi accès à un imaginaire du savoir qui fascine Flaubert et dans lequel s’alimentent ses fictions, ce qui ne l’empêche pas par ailleurs d’ironiser sur le scientisme, et de déconstruire dans La Tentation de 1874 ou Bouvard et Pécuchet certains savoirs naturalistes lorsqu’ils sont utilisés comme des croyances. Ce numéro de la revue Flaubert de l’ITEM rendra compte de l’ambiguïté du recours aux sciences naturelles qui alimentent parfois le rêve, l’hallucination et contribuent à l’élaboration de représentations étranges voire fantastiques. Ambiguïté aussi parce que les savoirs utilisés sont éventuellement des savoirs archaïques, en décalage avec la science de l’époque, ou inversement parce que les représentations élaborées dans une fiction située dans le passé (l’antiquité par exemple) et à partir d’images et d’idées anciennes peuvent être infléchies vers des questionnements modernes.
Ce numéro sur les sciences de la nature et de la vie dans la réflexion, le travail et l’œuvre de Flaubert regroupera des contributions qui permettront de mieux connaître le contexte épistémologique dans lequel Flaubert travaillait (et son entourage scientifique), ses lectures, l’impact esthétique et épistémologique des savoirs utilisés, leur retraitement fictionnel dans les manuscrits, la présence implicite ou explicite des savoirs dans les textes, ce qui motive leur utilisation, les effets produits. Les articles pourront aborder la mise en texte des savoirs naturalistes soit d’un point de vue esthétique, ou épistémologique, voire idéologique et religieux.
Coordinatrice du numéro : Gisèle Séginger –  gisele.seginger@univ-mlv.fr
Professeur à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée
Responsable du programme « Littérature et savoirs du vivant – XIXe et XXe siècle »
à la Fondation Maison des sciences de l’homme de Paris
Chercheur associé à l’ITEM (équipe Flaubert)

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